Il
s’agira ici d’étudier une toute récente matière pour ce qui est de la RDC,
nouvellement replongée dans les habitudes électorales.
La
plupart d’infractions et autres fautes qui seront étudiées sous cette rubrique
le sont essentiellement à titre pédagogique, tout en entrouvrant sur des
possibilités et schémas possibles de réformes.
Généralement
ces fautes consistes dans :
A.
Le non-respect du principe d’égalité des candidats
L’égalité
de tous devant la loi est un principe général de droit posé par la Constitution
congolaise.
La
Constitution, notamment à travers son article 12 dispose : « tous les congolais sont égaux devant la loi
et ont droit à une égale protection des lois ».
Pour
mettre en œuvre ces dispositions constitutionnelles, l’ article 33 de la loi
n°11/003 du 25 juin 2011 modifiant et complétant la loi n° 06/006 du 09 mars
2006 portant organisation des élections présidentielles, législatives,
provinciales, urbaines, municipales et locales attribue au Csac la
responsabilité de veiller au respect du principe d’égalité de production entre
les candidats en ce qui concerne la diffusion dans les médias publics de leurs
activités, écrits, déclarations ainsi que la présentation de leur personne et
de prendre des mesures de sanctions en cas de contravention à ces dispositions.
Il
est important pour les médias et leurs professionnels de savoir que
conformément à cette loi, le Csac peut intervenir auprès des autorités
compétentes, y compris les autorités judiciaires, pour exiger le respect dudit
principe et pour que soient prises toutes les mesures susceptibles d’assurer
cette égalité.
La
même loi donne au Csac le pouvoir de veiller à ce que les candidats aient un
accès égal aux médias publics pendant leur campagne électorale. Le Csac arrête
des mesures pratiques à ce sujet en concertation avec la Ceni.
Ces
mesures sont publiées un mois avant le début de la campagne électorale.
Tel
est le cas pour la Directive n°Csac/AP/0002/2011 du 27 septembre 2011 relative
à la campagne électorale à travers les médias, prise par le Csac et dont les
dispositions spécifiques « règlementent, à titre exclusif, la campagne
électorale 2011 à travers les médias[1] ».
Par
dérogation à ce principe, le Csac peut, par une décision dûment motivée et
notifiée, s’opposer à la diffusion d’une émission de la campagne électorale si
les propos tenus sont injurieux, diffamatoires ou révèlent un manquement grave
aux dispositions de la constitution ou des lois.
Le
Csac peut ordonner ou interdire la diffusion partielle ou totale de l’émission
incriminée.
En
respect du droit de la défense, il aussi important de savoir que cette décision
peut être contestée sans frais, dans les quatre jours, devant le Conseil d’Etat[2] qui se prononce dans les
quarante-huit heures suivant sa saisine.
Pour
ce qui est du régime répressif du non-respect du principe d’égalité, l’article
81 de la loi du 25 juin 2011 dispose : « Quiconque entrave ou tente
d’interdire ou de faire cesser toute manifestation, rassemblement ou expression
d’opinion pendant la campagne électorale, est puni d’une servitude pénale
principale de douze mois au maximum et d’une amende de 100.000 à 200.000 Francs
congolais ».
B.
La divulgation des renseignements individuels
La
loi n°11/003 du 25 juin 2011 modifiant et complétant la loi n° 06/006 du 09
mars 2006 portant organisation des élections présidentielles, législatives, provinciales,
urbaines, municipales et locales prévoit et punit toute divulgation, y compris
par la voie des médias, de « renseignements
individuels communiqués à l’occasion d’opérations d’identification,
d’enrôlement ou même de vote ».
Pour
ce qui est du régime répressif de cette infraction, l’article 85 de cette même
loi dispose qu’ : « est puni d’une servitude pénale principale de sept jours
et d’une amende ne dépassant pas 40.000 Francs congolais, toute personne qui,
sur les lieux d’un bureau de vote :
- fait connaître l’option en faveur de
laquelle elle se propose de voter ou pour laquelle elle a voté (cette
communication peut se faire à travers les médias et les professionnels des
médias doivent s’interdire non seulement de ne pas rechercher ces informations
mais aussi de ne pas les publier lorsqu’elles sont portées à leur connaissance)
;
- cherche à connaître l’option en faveur
de laquelle un électeur se propose de voter ou pour laquelle il a voté ;
- ayant porté assistance à un autre
électeur, communique le choix pour lequel cet électeur a voté ou abuse de la
confiance de la personne assistée en modifiant son vote ».
C.
L’interdiction de faire campagne en dehors de la période légale
A
dessein ou par ignorance, plusieurs fois, sollicités par des candidats ou des
parties politiques, les médias ont appuyé des opérations des campagnes
électorales.
L’infraction
qu’ils commettent dans ces circonstances est spécifique et contextuellement
limitée à la période de la campagne électorale.
Elle
est prévue et punie par l’article 80 de la « loi n°11/003 du 25 juin 2011
modifiant et complétant la loi n° 06/006 du 09 mars 2006 portant organisation
des élections présidentielles, législatives, provinciales, urbaines, municipales
et locales161 ».
Cet
article dispose que : « quiconque se livre à la campagne électorale en
dehors de la période légale est puni d’une amende de 20.000 à 100,000 Francs
congolais ».
Il
est important de noter ici que l’expression « la campagne électorale en dehors de la période légale » pourrait
soulever une question de compréhension.
Dans
notre entendement, cette expression veut dire tout simplement « en dehors de la fourchette de temps fixé par
la loi pour la campagne, que ce soit avant ou après celle-ci, y compris en
dehors de toute période de déclenchement du processus électoral ».
Il
faut noter que les dispositions pénales relatives à cette incrimination sont
confortées par la Directive n°Csac/AP/0002/2011 du 27 septembre 2011 relative à
la campagne électorale à travers les médias, bien entendu pour la période
qu’elle couvre.[3]
Au sens de la
même Directive « Conformément à l’article 11 de la loi électorale, la
campagne électorale 2011 à travers les médias court, conformément au calendrier
arrêté par la Ceni, du 28 octobre au 26 novembre 2011 pour les élections
présidentielle et législatives » et son article 50 affirme que « La
campagne électorale à travers les médias prend fin à minuit, 24 heures avant le
jour du scrutin ».[4]
D.
La recherche et communication sur le vote d’autrui sur le lieu du vote
Le
principe posé par les lois congolaises c’est le caractère secret du vote.
C’est
à ce titre que plusieurs dispositions de la loi électorale, dont l’article 85
invoqué plus haut, prévoient et punissent « la recherche d’informations sur le vote d’autrui aux fins d’une
publication ».
Cette
infraction n’est pas couramment poursuivie ni par les instances judiciaires ni
par les instances professionnelles en RDC, probablement à cause de l’habitude
électorale qui y est encore toute récente.
Pour
une meilleure appréhension, il faut relever que les dispositions de l’article
85 sont plus compréhensives lorsqu’elles sont rapprochées de celles des
articles 88 et 90 de la même loi qui disposent respectivement qu’: « est
punie d’une servitude pénale principale de six mois à cinq ans et d’une amende
de 200.000 à 1.000,000 Francs congolais, toute personne qui : 1. use à
l’endroit d’un électeur des menaces, des violences, des injures ou des voies de
fait en vue de le déterminer à s’abstenir de prendre part au vote ou
d’influencer son choix ; 2. engage, poste un individu ou réunit un groupe
d’individus armés ou non dans le but d’intimider les électeurs ou de troubler
l’ordre avant, pendant ou après le déroulement du vote ; (…) » ; et qu’ «
est puni d’une servitude pénale principale de six mois tout membre de la
Commission électorale nationale indépendante ou de sa représentation locale,
sous réserve des cas autorisés par la présente loi ou par le code pénal
ordinaire en matière de secret professionnel, qui aura révélé les résultats de
vote à des tierces personnes avant la clôture des opérations de vote (dont
par voie des médias)… ».
En
outre, les auteurs de ces infractions sont déchus de leurs droits civils et
politiques pendant une période de six ans, conformément à la loi.
Durant
les élections présidentielles et législatives de novembre 2011, plusieurs
médias congolais proches de l’opposition ont été sanctionnés du fait d’avoir,
pour chacun d’eux donné pour gagnant leur candidat favori respectif.
C’est
ainsi que dans le cadre de l’émission « Soutien
à Etienne Tshisekedi » (SET) diffusée par la chaine privée de télévision
RLTV, celle-ci a proclamé l’opposant congolais Etienne Tshisekedi wa Mulumba
gagnant aux élections présidentielles.
Une
décision de l’instance de régulation des médias a suspendu ladite émission pour
une durée de 7 jours la première fois et pour une durée relativement plus
longue du fait de la récidive.
Voilà, en quelques lignes, les
infractions, toutes nouvellement introduites dans la législation congolaise, et
qui se trouvent directement liées au contexte électoral.
[2] Qui n’existe pas encore certes,
mais dont les attributions sont exercées à ce jour par la Chambre
administrative de la Cour suprême de justice.
[3] Son
article 1er dispose : « les dispositions de la présente Directive
réglementent, à titre exclusif, la campagne électorale 2011 à travers les
médias ».
[4] Il s’agit ici des citations
purement indicatives, le processus électoral en cours n’ayant pas encore
légiféré sur ces questions et procédures.
L'auteur défend les libertés dans un pays en voie de devenir un Etat, une République et une Démocratie...