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lundi 1 juin 2009

ENGAGEZ LA PRESSE CONGOLAISE A INFORMER SUR LA JT !

Plusieurs fois la question du rôle des médias dans la dissémination des notions relatives à la Justice Transitionnelle (JT), à l’information et à la formation de l’opinion sur ces notions ont effleuré les oreilles et les esprits d’aucuns. Il reste dommage que le débat sur la JT est restée un apanage élitiste. Alors que la justice constitue aujourd’hui une quête permanente de tous les congolais, il est souhaitable d’étendre ce débat à d’autres classes sociales, en espérant, qu’un jour, la population congolaise sensibilisée, s’en approprie pour être à la base des revendications des politiques gouvernementales de JT.

L’acteur majeur qui devrait être impliqué dans cet effort d’extension de débat est certes la presse congolaise, nombreuse et pleine d’atouts multiplicateurs.

Alors que la République Démocratique du Congo a déjà raté le rendez-vous d’une véritable commission de vérité et de réconciliation, que des procès sur des crimes internationaux et graves violations des droits de l’homme commis en RDC, que le 04 avril 2009, président de la République a fait son choix quant au mécanisme qu’il entend mettre en branle pour lutter contre l’impunité, à savoir : la justice, …le professionnel de la presse congolaise semble ne pas saisir la hauteur des attentes qui lui sont déférées par la société.

La République Démocratique du Congo se trouve à un décisif tournant de la consolidation de « sa démocratie » ; et l’amplification de ce débat associant toutes les classes sociales du pays en est le gage.

Les médias et les professionnels des médias sont ainsi interpellés en tant qu’informateurs et formateurs de proximité et en tant que vecteurs incontournables de lutte contre l’impunité et de façonnage des démocraties à travers le monde.

La problématique de cet engagement possible des médias intègre certes plusieurs préalables et défis. Que savent les professionnels des médias à propos de la JT ? Sont-ils intéressés à pénétrer ce nouveau monde d’idées et de débats ? Les médias congolais qui demeurent essentiellement préoccupés par le lucre, tout au plus leurs propriétaires, sont-ils prêts à s’engager dans un tel débat sans sensationnel et sans autre contrepartie que la formation et l’information au mieux de la démocratie et du développement ?

Un des premiers fora qui a essayé d’impliquer effectivement la presse congolaise dans le domaine de la justice transitionnelle date d’avril 2008 et a été organisé à Kinshasa, à l'initiative de la Fondation BBC World Trust et ICTJ (Centre International pour la Justice Transitionnelle).

A cette occasion, nous qui avons suivi les reportages sur cet important forum, espérions que l’effet multiplicateur allait faire la suite, connaissant le nombre des médias qui fonctionnent, tout au moins à Kinshasa. L’effet attendu n’a pas suivi. Et nos espoirs ont été déçus ! Les leçons reçues ont été tues et enterrées puisqu’elles ont manqué un intérêt… Peut-être pour des professionnels peu tournés vers des situations peu ou pas lucratives et préoccupés de « trouver le pain quotidien » qui n’apparait certes pas dans les théories de JT…

Une seule organisation des journalistes pour la JT a été créée. Mais elle non plus n’a pas encore su capitaliser l’apport des partenaires de son domaine pour amplifier l’information et former la population congolaise.

Le défi demeure donc : avec quelle presse former et informer les congolais sur la JT ? Comment informer et former la population à travers ces médias peu outillés eux-mêmes dans le domaine ? Comment susciter l’intérêt des médias et de leurs propriétaires ? Comment les médias congolais peuvent-ils être à la base d’élaboration des politiques gouvernementales sur la JT et ainsi contribuer à la lutte contre l’impunité des crimes internationaux et graves violations des droits de l’homme commis en RDC pendant près de 16 ans ?

Les propriétaires des médias devraient être sensibilisés sur l’importance de la JT pour un pays qui se trouve dans une situation comme celle de la RDC. La sensibilisation doit non seulement viser leur adhésion à l’idée, mais aussi l’intérêt pour eux et pour leur pays d’intégrer des programmes relatifs à la JT dans leurs lignes éditoriales. Par la suite, les journalistes de la presse écrite, audiovisuelle et en ligne seraient sériés pour participer à cet ambitieux programme.

Mais à qui incomberait la responsabilité de sensibiliser ou de faire le choix des intéressés ? Le ministère en charge de la justice, celui en charge de la presse et de la communication ou les recteurs et doyens des universités congolaises où sont enseignés le journalisme et la communication me semblent indiqués. Mais aussi d’autres partenaires qui travaillent dans ce domaine et qui ont l’ambition de voir la population congolaise s’approprier les notions de JT et être, un jour, sait-on jamais !, à même de revendiquer la mise en place des politiques gouvernementales de JT face à autant de crimes et des violations graves des droits de l’homme qui ont été commis en RDC et qui laissent encore largement la place à des attitudes revanchardes, sources de futures autres graves violations. En effet, RDC qui fournit des efforts pour sortir d'une longue guerre qui a détruit tout son tissu social et les bases d'un état de droit, a besoin de la JT qui lui permettra de passer doucement mais sûrement vers une justice digne d'un Etat démocratique, mais surtout d'avoir une société apaisée de ses rancunes et rancœurs.

Quelle serait la forme que prendrait l’implication des propriétaires des médias et leurs professionnels ? Les formations en forme d’ateliers et des séminaires ont déjà montré leurs limites. La sensibilisation des propriétaires des médias et la formation des journalistes pourraient prendre une forme différente : des séances d’échanges ou des matinées scientifiques, par exemple ! La création d’un réseau en forme de groupe d’échange sur l’Internet ou la mise en place d’un réseau virtuel qui animerait des débats, des conférences ou des leçons occasionnelles…

En effet, bien qu’il y en ait qui ont pu donner d’appréciables résultats, il a été remarqué que les ateliers et les séminaires demeurent très improductifs pour plusieurs raisons parmi lesquelles le fait qu’ils constituent une simple occasion de recevoir un per diem pour certains invités ou par le fait que certains organisateurs de ces fora ne prévoient aucun mécanisme de suivi, d’évaluation de leur impact ou de la répercussion des formations données.

Dans ces cas, les formations reçues sont restées lettres mortes et les personnes les ayant suivies les ont oubliées, excepté dans leurs CV.

La formation et l’information de la population sur la JT demeure d’une importance incommensurable pour la RDC et devrait donc passer par deux étapes : la sensibilisation des propriétaires des médias, la formation des professionnels et finalement la formation et l’information de l’opinion par voie de conséquence de l’engagement des premiers.
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L'auteur défend les libertés dans un pays en voie de devenir un Etat, une République et une Démocratie...