lundi 7 juillet 2008

Contrats passés entre la RDC et le groupe d'entreprises chinoises


Les enjeux de la convention minière RDC-Chine.
Analyse des experts congolais

Rapport-Synsthèse

Il m’a été demandé de faire un rapport-synthèse des conférences que nous avons écoutées au cours de cette journée et dont le thème général est : « Les enjeux de la convention minière RDC-Chine ». J’ai inclus dans mon rapport l’introduction du Père Minani qui a eu l’avantage de situer la problématique de la convention Chine-RD Congo dans une vision globale, c’est-à-dire celle d’un monde qui se globalise.

Les conférences dont je fais le rapport-Synthèse ont suivi le mot de bienvenu prononcé par le Père Ferdinand Muhigirwa, directeur du Cepas, qui a rappelé que l’objectif des conférences était de comprendre et d’aider à comprendre la Convention que la RDC a signée avec la patrie chinoise, Convention qui, on le sait, fait encore couler beaucoup d’encre sans qu’on en comprenne les enjeux réels.

Le premier à prendre la parole fut le père Rigobert Minani, chef du secteur Animation du Cepas. Il a situé la problématique de la coopération RDC-Chine dans une perspective beaucoup plus large. En effet, la coopération de la RDC avec la Chine ayant débouché sur la fameuse convention minière RDC-Chine remonte au sommet de novembre 2006, sommet qui a réunis 48 chefs d’Etat et autres représentants de haut niveau. C’est à cette occasion qu’est né le « Nouveau partenariat stratégique entre la Chine et l’Afrique ». La Chine avait, à cette occasion, d’intensifier son aide au développement de l’Afrique.

La Convention entre la Chine et la RDC dépasse le cadre restreint de la RDC et s’inscrit dans l’évolution du monde. Nos partenaires traditionnels (la France, la Belgique, les USA, le FMI, la Banque mondiale) sont aussi intéressés à cette convention, peut-être plus que le Congolais eux-mêmes. Tous ces partenaires nous interpellent sur un certain nombre de points : la prise en compte de l’environnement, de la bonne gouvernance et de la dette extérieure, la lutte contre la pauvreté, le respect des droits de l’homme, etc. Mais le grand problème, c’est nous-mêmes Congolais. Que voulons-nous ? Il s’agit de nous regarder en face pour tirer le maximum de profit non seulement de la coopération entre notre pays et la Chine mais aussi de toute coopération dans laquelle nous sommes engagés.

La deuxième conférence fut celle du Dr Tambwe Dieudonné. Intitulée « Valorisation des ressources minérales dans la Convention minière RDC-Chine », cette conférence s’est focalisée sur le cuivre. Par rapport au cuivre, précisément, il y a lieu de se réjouir de la 2ème place que la RD Congo occupe dans le concert de nations ses 70 millions de tonnes de réserves. Nous sommes ainsi classés deuxième après le Chili et avant les USA. Avec des chiffres à l’appui, Dr Tambwe a tenté de montrer combien les cours du cuivre ont varié au cours des années. De ce constat, il a attiré notre attention sur ce fait précis : « L’appréciation d’un métal, d’une ressource n’est pas linéaire. Certains éléments entrent en jeu et ne dépendent pas nécessairement du bon vouloir humain ». Mais le plus important, c’est de tirer profit du moment favorable, de la conjoncture meilleure.

Cette conférence a porté sur la valorisation des ressources minérales…Pour valoriser un produit, il faut le connaître, l’apprécier, le quantifier. On dit souvent que la RDC est un scandale géologique. C’est peut-être vrai. Mais qu’est ce que cela signifie en termes quantitatifs ? Le projet de valorisation d’un métal, et pour le cas qui nous concerne, l’extraction minérale, commence par son identification et sa quantification. De l’élément qualitatif donc, il est nécessaire et obligatoire de passer à l’élément quantitatif. Les réserves géologiques ne sont pas éternelles et doivent être transformées en réserves minières qu’il faut extraire….Cela nécessite du travail et des moyens même si on l’oublie souvent. L’extraction minérale est un processus qui se fonde sur les données qui doivent être disponibles pour arriver à un projet bancable. Il faut donc avoir non pas des réserves possibles, mais des réserves certaines et ce sont ces réserves certaines qui doivent être valorisées. La valeur ne se produit pas à partir de rien : c’est à partir du concret, du quantifiable. Entre le potentiel et la réalité, il y a du travail à faire dont les prospections, la campagne de sondage, les différentes recherches.

La troisième conférence est celle de l’honorable Ingénieur Mutamba Dibwe et a été intitulée : « Regards critiques sur la convention minière RDC-Chine en rapport avec le code minier et les pratiques dans le secteur minier ». L’honorable est parti d’un regard historique, en comparant les cours de nos matières premières dont les mines et l’énergie. S’appuyant sur la conférence du Dr Tambwe, il a confirmé le caractère cyclique et linéaire des minerais. Il a en même temps regretté le fait que l’Etat congolais n’ait pas profité du temps où les cours lui étaient favorables pour amorcer le développement du pays. Les ressources minière ne sont pas renouvelables, elles ne sont pas inépuisables, d’où la nécessité d’un investissement durable et profitable. Le secteur minier, celui qui nous concerne, est un secteur à haut risque. Qui ne risque rien, n’a rien, dit-on. Mais il faut réduite le pourcentage du risque. Le remède que l’on peut utiliser pour profiter au maximum de ce secteur, c’est de choisir judicieusement les techniques et les équipements de travail.

A propos de la convention proprement dite entre la Chine-RDC, l’honorable pense que le choix d’utiliser une partie d’emprunt pour la construction des infrastructures de base est judicieux et qu’il doit par conséquent être encouragé. Il faut que les infrastructures soient réellement construites. On remarque néanmoins que la partie chinoise conditionne l’application de certaines clauses par les études de faisabilité. Un autre problème peut être relevé, c’est celui de la fixation de taux de rentabilité. Le plus grave est la violation du nouveau code minier par l’exonération des taxes.

L’honorable conclut en disant que le contrat contient un atout majeur : la construction des infrastructures. Le contenu du contrat présente cependant des éléments de doute et d’inquiétude à certains endroits. Il a fini a disant que le contrat ne doit pas être moins bon que d’autres. Il doit simplement être bien négocié.

La 4ème conférence du jour a été tenue par maître Laurent Okitonembo Westhongunda et a eu comme titre : « Analyse juridique de la convention de collaboration entre la RD Congo et un groupe d’entreprises chinoises ». Ce type de contrat est appelé contrat d’Etat, lequel est défini comme un contrat international mixte liant d’une part, une personne morale de droit public, L’Etat ou une entité paraétatique, et d’autre part, un particulier, personne privée physique ou morale. Il est à espérer que les sociétés chinoises ont été régulièrement constituées selon la loi chinoise des sociétés et qu’elles ont été représentées par des personnes ayant réellement le pouvoir de le faire. Maître Laurent pense que la RDC ne pouvait pas être engagée par le seul Ministre des Infrastructures, Travaux Publics et Reconstruction et qu’il aurait fallu le contreseing des autres Ministres concernés. Le Maître affirme cependant que l’objet de la convention est certain et licite et constitue réellement un investissement. La convention RDC-Chine recèle beaucoup de conditions suspensives (articles 5.1, 6.20, 9.3) résolutoires (articles 13.1, 13.3.2, 15.1) et casuelles (art. 9, 9.3). Il note cependant que toutes les conditions suspensives et résolutoires sont en faveur de la partie chinoise tandis que les conditions casuelles sont prévues pour ce qui intéresse la partie congolaise.

Le maître conclut qu’on peut retenir que cette convention est plus léonine que toutes les autres conventions minières et révèle la démission ou l’incapacité pour la RDC de gérer elle-même sa reconstruction et le fait par procuration mais à un coût prohibitif.

Si je peux me permettre une appréciation personnelle, je dirais simplement ceci : nous avons le droit de nous interroger sur ce qui concerne notre pays, son passé, son présent et son avenir. C’est notre droit d’être critiques par rapport à ce qui touche notre pays et son avenir. S’exercer à ce travail d’éthique de la rationalité est nécessaire et répond à l’objectif du Centre d’Etudes pour l’Action Sociale. La RD Congo est, dit-on, un scandale géologique. Mais une question se pose : n’est-il pas gênant de qualifier notre pays de scandale géologique lorsque ses habitants vivent dans une pauvreté scandaleuse? Une autre question serait celle-ci : dans le contexte qui est le nôtre, passer outre certaines exigences ne serait-il pas la voie de la sagesse s’il est établi que ce que nous gagnons de la Convention avec la Chine pourrait nous permettre d’amorcer notre développement et de nous placer, un jour, dans une position de force? La dernière réflexion, c’est celle-ci : apprenons à faire nôtre ce proverbe dont on m’a toujours dit qu’il était d’origine chinoise : « Si tu me donnes un poisson, j’aurai encore faim. Mais si tu m’apprends à pêcher, je n’aurai plus jamais faim ». Merci.

Rapport fait par Ghislain TSHIKENDWA Matadi, SJ
Editeur et Rédacteur en chef de la revue Congo-Afrique